Le Fort de Vauville
Fièrement installé au bord de la plage normande de la Devise, surveillant la Manche, le fortin de Vauville est un monument à l’apparence rustique mais unique en France. Bâti en 1760 sous le règne de Louis XV (1715-1774), c’est aujourd’hui le seul fortin encore debout parmi les six construits à cette époque le long des côtes du Cotentin dont la réalisation fut confiée à un cer
tain Ricard. Ayant saisi l’importance de cette région à protéger, poste avancé au milieu de la Manche, Vauban décida dès le XVIIème siècle de faire construire un réseau de défense côtier du Mont-Saint-Michel jusqu’à Carentan. Ce système devait prévenir d’une éventuelle invasion anglaise et protéger le mouillage des navires alliés venus attendre le moment favorable pour passer le cap de la Hague. Dans le contexte des incessantes guerres navales franco-britanniques, de la guerre des 7 ans (1756-1763), la presqu’île du Cotentin occupe une position remarquable et stratégique. Ce réseau de défensif comprenait deux types de bâtiments : les fortins disséminés le long des côtes qui communiquaient entre eux grâce à des signaux optique par relais; et les forts, plus grands et moins nombreux, où logeaient le commandement et les soldats de réserve. Les fortins se composaient le plus souvent d’une maison ou d’un abris de 10 mètres par 6 mètres aux murs de moellon montés à la chaux de 1,20 mètre d’épaisseur pour résister aux tirs de canons. Ce même bâtiment était divisé en trois pièces, la réserve des poudres et denrées, la chambre du capitaine et celle des soldats. Entourée d’un haut mur d’enceinte, le fortin comprend un chemin de ronde donnant sur une plateforme de tir où se trouvait un canon léger. Après avoir subi quelques attaques au début du XIXe siècle, un épaulement en terre, avec un mur de soutien maçonné, a été ajouté au fort de Vauville ainsi qu’un second corps (maison) de garde pour compléter l’ouvrage initial jugé trop exigu et vulnérable. Du 11 au 12 mars 1804, les anglais ont tenté de détruire des bâtiments français échoués sur la côte en cours de sauvetage. À 2h du matin, une corvette avec 18 hommes débarqua sur les côtes. Au moment de reprendre la mer, le lieutenant Bazin, en charge du fort, et ses quatre hommes leurs coupèrent la route. Deux anglais furent tués et sept autres furent fait prisonniers pour les interroger. Le 2 avril de la même année, deux « cutters » et une corvette vinrent bombarder le fort. Celui-ci répliqua avec ses canons légers, sans succès. L’ennemi était hors de porté. Après quelques échanges de tirs, deux péniches ont tenté un débarquement. Mais ils furent découragés en voyant un colonel et ses 15 douaniers, ainsi qu’une troupe de paysans armés arriver sur la plage. On sait également que le fort fut utilisé pendant la seconde guerre mondiale, en tant que bunker du “mur de l’Atlantique” allemand pour contrer le débarquement des Alliés. De nos jours, il ne reste pratiquement plus de fortins en état car ils furent pour la plupart détruits pendant les guerres ou abandonnés et vendus. Le Fortin de Vauville, inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en 1972, a l'avantage d'avoir été préservé et restauré par l’architecte Guillaume Pellerin avec des matériaux locaux dans le respect de l’ouvrage initial. Eric Pellerin s’emploie aujourd’hui à le maintenir en vie et à le faire découvrir au plus grand nombre. Entièrement rénové de l’intérieur, il est le seul fortin à avoir gardé son aspect extérieur d’origine. Guilain Ruellan
Sources :
• Archives du Génie, Fort de Vincennes
• Vikland, La r***e du Cotentin n°18 / Edmond Thin
• Écrits de Guillaume Pellerin
• sites-vauban.org