28/05/2024
INFO..TOURISME
3 MILLIARDS DE FRANCS DE DÉFISCALISATION MIS EN JEU PAR LE PAYS.
Le gouvernement a lancé vendredi deux appels à manifestation d’intérêt très attendus par la filière touristique.
- Création et agrandissement d’hôtels
- construction de pensions de famille
- achat de bateaux de charter…
Des AMI qui permettront de distribuer la moitié des 6 milliards de francs de défiscalisation prévus pour 2024, et qui répondent aux règles fixées par la nouvelle loi fiscale, dont l’avenir est toujours incertain.
Si ces procédures promettent aux petites structures un meilleur accès aux aides, les grands groupes du secteur dénoncent toujours un soutien en baisse du Pays, d’autant que les rénovations d’hôtels et les grands projets sont exclus du dispositif.
Les patrons de pensions avaient rendez-vous à la présidence ce lundi matin. L’occasion d’échanger sur les nouvelles règles que le Pays veut instaurer dans le secteur, sur les aides du service tourisme, ou encore les difficultés rencontrées pour développer l’activité dans les archipels ou à Tahiti… L’occasion, surtout, de parler des deux appels à manifestation d’intérêt (AMI) tout juste lancés dans le secteur par le gouvernement.
La moitié de l’enveloppe de défiscalisation 2024
Des appels très attendus, puisque, depuis la réforme de la défiscalisation locale sous la précédente mandature, ils sont les seules portes d’entrée de l’aide fiscale à l’investissement.
L’année dernière, plusieurs AMI, pour la plupart préparés avant l’entrée en fonction du nouveau gouvernement, avaient été lancés dans le secteur de l’aquaculture, de la pêche hauturière, du transport maritime ou de l’aérien… Mais rien dans le secteur du tourisme, dont le développement est pourtant central dans le programme économique présenté par Moetai Brotherson. L’exécutif attendait en fait la révision des règles de défiscalisation, actée lors de la désormais fameuse loi fiscale de décembre dernier, annulée par le Conseil d’État en mars et revotée, avec caractère rétroactif, le 11 avril dernier.
Un feuilleton qui avait retardé ces deux AMI, d’abord prévus pour le début d’année, et finalement publiés au journal officiel vendredi. Le premier concerne les charters nautiques et donc l’achat de navires de plaisance à louer, et le second, qui intéresse beaucoup plus de professionnels, porte sur la création et l’agrandissement d’hôtels ainsi que la construction de pensions de famille. Enveloppe globale prévue pour ces deux appels touristiques : 3 milliards de francs, soit la moitié des 6,1 milliards de défiscalisation budgétés pour 2024.
Pas de rénovation, pas de « grands projets » et plus de mixité
Le gouvernement, qui communique toujours sur son cap de « 600 000 touristes à horizon dix ans », compte sur ces aides pour créer chaque année, d’ici 2027, « 250 unités d’hébergement », avant de doubler la cadence à partir de 2028. Son président avait déjà plusieurs fois développé les grandes orientations de la politique de défiscalisation : davantage de diversité dans les projets soutenus, une priorité aux dossiers plus « aboutis » pour éviter les milliards de francs d’agréments jamais consommés, un « mix » qui fait davantage de place aux pensions et à la petite hôtellerie face aux grands hôtels, une meilleure accessibilité – la procédure de candidature a été simplifiée – et, de façon générale, davantage de projets soutenus quitte à leur accorder moins de crédit d’impôts. La réforme du Code des investissements avait d’ailleurs confirmé ce cap, contesté par le patronat, et critiqué par le Cesec, en venant « rationaliser » les dépenses fiscales : le taux d’aide aux projets hôteliers, qui pouvait atteindre les 60% jusqu’à l’année dernière, a été ramené à 20% pour les projets de Tahiti, Moorea et Bora Bora, et 30% pour les autres îles.
Ce matin, les représentants des pensions paraissaient plutôt satisfaits de la présentation, et surtout des promesses d’accès élargi à l’aide fiscale pour leurs projets. Du côté des professionnels de la « grande » hôtellerie, en revanche, on n’a toujours pas digéré la réforme « surprise » de cette défisc’, qui rendent les nouvelles AMI « très peu attractives ». À cause des seuils, bien sûr, ou de l’enveloppe limitée. Mais aussi parce que le dispositif exclut les rénovations d’hôtels, alors que plusieurs resorts attendent des liftings importants pour relancer leur activité. Comme annoncé, ces appels ne concernent pas non plus les projets de plus 10 milliards de francs. Un autre dispositif, qui suit des règles différentes – et ressort d’une autre enveloppe budgétaire – doit être réservé à ces « grands projets », avait précisé la présidence. Sans convaincre les principaux intéressés, toujours persuadés que le Pays risque de tarir l’investissement privé dans le tourisme polynésien.
En attendant le Conseil d’État
Outre les critiques, c’est une ombre juridique qui pèse sur ces deux AMI. Les règles auxquelles elles obéissent étant issues de la nouvelle loi fiscale, son annulation par le Conseil d’État pourrait remettre en cause la procédure. Or des recours ont été déposées, après la deuxième adoption de la loi le 11 avril, d’abord par les élus autonomistes dans la foulée des débats, puis par le Medef début mai. La décision des juges parisiens pourrait attendre le mois de juillet, et le gouvernement a donc fait le choix « d’avancer ». Du côté de la présidence, on précise que l’annulation des seules dispositions qui concernent la rétroactivité de la loi, celles qui sont le plus critiquées, ne remettraient pas en cause ces appels à manifestation d’intérêt. Le dépôt des dossiers est possible auprès de l’Agence de développement économique jusqu’à 1er juillet pour les charters nautiques, et jusqu’au 15 octobre prochain pour les hôtels et pensions de famille. Objectif du gouvernement : effectuer le dépouillement et annoncer les lauréats avant la fin de l’année.
( SOURCE : RADIO 1 )