12/12/2023
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đ PRĂSENTATION DE LA PESTE:
âĄOran, 1940. Le Docteur Rieux doit lutter contre une Ă©pidĂ©mie de peste qui oblige les autoritĂ©s Ă fermer les portes de la ville, prisonniĂšre du malheur. Le Dr Rieux lutte de toutes ses forces contre le mal, refuse toute justification mĂ©taphysique Ă cette calamitĂ©, contrairement au pĂšre Paneloux, qui voit dans la peste une malĂ©diction divine, une punition des pĂ©chĂ©s humains.
âĄCe roman allĂ©gorique souffre plusieurs interprĂ©tations. La peste symbolise le flĂ©au du malheur sous toutes ses formes, y compris celle de la guerre. Lutter contre la peste, si pĂ©rilleuse, si alĂ©atoire, voire si vaine que soit cette lutte, est la seule conduite humaine possible. Lâhomme doit dĂ©passer lâabsurde de sa conduite et du mal, par un acte de protestation qui lui permette de rejoindre les autres « dans les seules certitudes quâils ont en commun et qui sont lâamour, la souffrance, lâexil ».
âĄCamus distingue trois Ă©tapes possibles pour lâhomme qui fait lâexpĂ©rience de lâabsurde : lâhomme quotidien vit lâabsurde sans en avoir une claire conscience, tel Meursault, le hĂ©ros de LâĂtranger, au dĂ©but du roman ; lâhomme absurde a pleinement compris lâabsurde et lâassume, comme le mĂȘme Meursault Ă la fin du roman ; lâhomme rĂ©voltĂ© est quant Ă lui capable de construire sa vie sur lâabsurde.
đ LA TRAME DU ROMAN
âĄLâintrigue du roman prĂ©sente lâhistoire dâune Ă©pidĂ©mie de peste qui sĂ©vit sur la ville dâOran dans les annĂ©es 1940. Des rats viennent mourir au grand jour ; ils portent le bacille de la peste. LâĂ©pidĂ©mie se rĂ©pand dans la ville quâil faut fermer ; le hĂ©ros, le docteur Rieux - on apprend Ă la fin du livre que câest lui en rĂ©alitĂ© qui relate les Ă©vĂ©nements - est sĂ©parĂ© de son Ă©pouse partie se soigner dans une ville voisine.
âĄCamus distingue plusieurs rĂ©actions face Ă ce flĂ©au. Cottard, le cynique, se rĂ©jouit de façon malsaine des souffrances qui sâabattent sur les hommes, il tire profit de lâĂ©pidĂ©mie en organisant le marchĂ© noir ; son attitude vaine le conduit Ă la folie. Le prĂȘtre Paneloux voit dans la peste le chĂątiment de Dieu qui punit les hommes pour leur Ă©goĂŻsme ; il invite les fidĂšles Ă la conversion ; mais, profondĂ©ment bouleversĂ© par la mort dâun jeune enfant, il se tait et meurt seul, sans avoir demandĂ© lâaide de la mĂ©decine. Grand, le fonctionnaire, contaminĂ©, guĂ©rit sans quâon sache exactement pourquoi. Rambert, le journaliste parisien sĂ©parĂ© de la femme quâil aime, met tout en Ćuvre
pour quitter la ville ; lorsquâil en a la possibilitĂ©, il choisit dây rester pour se battre avec ceux qui luttent. Rieux et Tarrou agissent pour organiser un service sanitaire qui soulage, autant que faire se peut, la souffrance des hommes. Ă la fin du roman, Tarrou meurt et Rieux apprend par un tĂ©lĂ©gramme que sa femme, elle aussi, est morte.
âĄLâune des scĂšnes les plus importantes du roman raconte lâagonie terrible et la mort dâun jeune enfant, le fils du juge Othon. Elle est commentĂ©e par Rieux en ces termes devenus cĂ©lĂšbres : « Je refuserai jusquâĂ la mort dâaimer cette crĂ©ation oĂč des enfants sont torturĂ©s ».
đ LA PESTE, UNE METAPHORE
âĄAu dĂ©but du roman, le narrateur prĂ©cise : «La peste fut notre affaire Ă tous » ; Ă la fin du rĂ©cit, il ajoute que ce flĂ©au « les a confrontĂ©s Ă lâabsurditĂ© de leur existence et Ă la prĂ©caritĂ© de la condition humaine ». La peste est une double mĂ©taphore.
đ Une mĂ©taphore historique et politique
âĄEn 1955, Camus prĂ©cise : « âLa Pesteâ, dont jâai voulu quâelle se lise sur plusieurs portĂ©es, a cependant comme contenu Ă©vident la lutte de la rĂ©sistance europĂ©enne contre le nazisme ». La peste est lâallĂ©gorie du nazisme, une grave maladie politique contagieuse et mortelle encore dĂ©nommĂ©e « la peste brune ». La population reprĂ©sente les victimes du nazisme, les Juifs en particulier ; la peste disparue, les survivants montrent une capacitĂ© dâoubli troublante. Cottard est celui qui tire profit de lâoccupation allemande pour sâenrichir. Paneloux reprĂ©sente lâimpasse dâune religion qui ne condamne pas clairement lâhorreur humaine du nazisme. Grand, fonctionnaire sans envergure, se rĂ©vĂšle toutefois utile par ses tĂąches administratives. Tarrou, Rieux, puis Rambert, sont les rĂ©sistants qui sâengagent contre lâoccupant. Rieux fait observer dans les derniĂšres pages que cette peste du totalitaÂrisme, mĂȘme si elle se fait oublier, demeure tapie et peut resurgir.
đ Une mĂ©taphore mĂ©taphysique et morale
âĄLa peste est aussi lâallĂ©gorie du mal qui est implantĂ© dans tout homme. Pour Tarrou, « Chacun la porte en soi, la peste, parce que personne, non, personne au monde nâen est indemne... Ce qui est naturel, câest le microbe ». Ce « microbe », le mal, consiste par exemple Ă rĂ©clamer, en sâen faisant une gloire, la peine de mort pour punir un assassin, comme le fait le pĂšre de Tarrou, qui est avocat gĂ©nĂ©ral, sans du tout se rendre compte quâil commet « le plus abject des assassinats ».
âĄAlors que Tarrou cherche Ă Ă©radiquer le mal, Ă ĂȘtre « un saint sans Dieu », Rieux, porte-parole de Camus, poursuit un but plus modeste : « Je me sens plus de solidaritĂ© avec les vaincus quâa les saints, dit-il. Je nâai pas de goĂ»t, je crois, pour lâhĂ©roĂŻsme la saintetĂ©. Ce qui mâintĂ©resse, câest dâĂȘtre un homme ». Ătre homme, pour Rieux, câest tout mettre en Ćuvre pour soulager souffrance des victimes du mal, et par lĂ donner un sens Ă sa \ par la solidaritĂ©, solidaritĂ© avec ceux qui souffrent, solidaritĂ© av ceux qui luttent. Mais cette lutte est sans illusion : ce nâest p Rieux et son Ă©quipe qui Ă©liminent la peste, « La maladie sembla partir comme elle Ă©tait venue ». Autrement dit, la peste existe toujours, jamais le mal ne sera totalement terrassĂ© ; aux hommes de demeurer vigilants.
âĄCamus travaille Ă La Peste dĂšs 1943 : il faut lire ce roman comme le second volet dâun diptyque, le premier Ă©tant constituĂ© par LâĂtranger et Le Mythe de Sisyphe. SâarrĂȘter au seul premier volet revient Ă trahir la pensĂ©e de Camus.