22/04/2023
Un peu d’histoire …
En 1930, l'architecte André Lurçat achève la construction de l'hôtel Nord-Sud sur la presqu'île Saint-François à Calvi, en Corse. La commande émane de l'artiste Jean Guastalla. Destiné aux intellectuels en villégiature dans le sud de l'Europe, ce programme de résidence d'été est dans l'air du temps : le monde de l'art voyage et se cultive alors sur les rives de la Méditerranée. André Lurçat jouit déjà d'une certaine notoriété dans le milieu des architectes du Mouvement moderne, grâce à ses réalisations parisiennes.
L'isolement de l'hôtel sur une côte rocheuse irradiée de lumière n'est pas sans évoquer la vision chère aux « modernes » de la monumentalité d'un temple antique dont les lignes géométriques dominent le paysage - à l'instar de la représentation corbuséenne de la villa -Baizeau, sur le rivage carthaginois.
Face à la citadelle de Calvi, le petit édifice résidentiel compte sept studios et la loge du gérant, répartis au rez-de-chaussée. Au niveau inférieur, un bar, une salle à manger et des locaux utilitaires sont disposés dans un socle très opaque adossé au talus.
Les studios bénéficient chacun d'un cabinet de toilette mis en exergue sur la façade ; tandis que sanitaires et baignoire sont regroupés dans un volume commun proche de l'entrée.
L'architecte fait preuve d'une approche raisonnée du contexte. Il traduit dans l'expression de chacune des élévations les données du programme, en fonction des orientations solaires et de la relation entre l'hôtel et le paysage côtier. L'élévation sur le front de mer et la citadelle est ponctuée par le rythme des appartements assemblés en ligne.
La plasticité des espaces de toilette en porte-à-faux et l'ensemble des volumétries jouent curieusement avec les blocs de roche du rivage. À l'opposé, la façade sud-ouest, qui abrite le long couloir distribuant les studios, est très opaque ; elle est seulement découpée par de petites meurtrières verticales réglées sur les entrées des studios. Elle peut être perçue comme un écho aux murailles de la citadelle. La proue du bâtiment se distingue par les courbes de ses volumes invitant à se rendre à l'accueil, ou à emprunter l'escalier conduisant en contrebas du terrain.
À l'extrémité nord, en poupe de l'ouvrage, le bar et la salle à manger ouvrent le socle sur l'horizon marin, en direction du continent, au moyen d'une grande baie horizontale.
L'architecture de l'hôtel confère à Lurçat une notoriété extra-hexagonale, les critiques de l'époque inscrivant l'ouvrage dans la ligne du Style international.
L’écrivain américain Ernest Hemingway y a séjourné.